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CFDT Crédit Agricole Languedoc

Crédit Agricole : « On est loin devant les néobanques ! »

11 Mars 2019, 00:05am

Publié par CFDT CA Languedoc

Crédit Agricole : « On est loin devant les néobanques ! »

Dominique Lefebvre, président de la Fédération nationale du Crédit Agricole. Raphaël Appert, premier vice-président de la Fédération Nationale du Crédit Agricole.

A l'heure où les banques réduisent la voilure pour alléger leurs coûts dans un marché de plus en plus concurrentiel, le Crédit Agricole joue la carte du territoire. La Fédération nationale, qui organise la représentation des Caisses Régionales, veut mettre ces dernières au cœur du nouveau plan à moyen terme que le groupe présentera le 6 juin. Objectif : maximiser les apports mutuels entre la structure cotée en Bourse Crédit Agricole SA, qui regroupe les filiales spécialisées comme PREDICA (assurance) ou CACIB (banque d'investissement), et les 39 Caisses autonomes avec leurs 7.000 agences. Pour accompagner ce plan, la banque verte ne veut pas réformer sa gouvernance, comme le projet « ROC » l'avait un temps envisagé, mais poser noir sur blanc certaines règles du jeu. Dans un contexte social chargé, ses dirigeants rappellent le soutien « massif » au pouvoir d'achat des Français réalisé à travers la renégociation des crédits. Un coup de pouce qui se chiffrerait en milliards d'euros. Malgré les tensions franco-italiennes, la banque mutualiste souligne aussi son engagement sur le marché bancaire italien.

 

Quel bilan tirez-vous de l'année 2018 ?

Raphaël Appert : notre modèle a montré toute son efficacité. Les Caisses Régionales du Crédit Agricole ont conquis 1,3 million de nouveaux clients, enregistré des encours de crédit en progression de 6,7 % et un résultat de 3,6 milliards d'euros. Il y a un an, on nous posait la question de savoir quel serait l'avenir de la banque de détail face aux nouveaux concurrents digitaux. La banque de détail, telle que nous la vivons, banque de proximité et universelle, crée énormément de valeur ajoutée.

 

Qu'est ce qui explique ce succès ?

R.A. : Nous pensons que notre performance sociétale est à l'origine de nos performances économiques et financières. Elle est le fruit de notre présence dans les territoires et sur un mode de gestion décentralisé, qui veut que nous ayons partout des Caisses autonomes et responsables devant leur raison d'être et leur utilité au territoire. C'est notre modèle fédéral avec ses 39 Caisses Régionales. Nous sommes devenus le premier assureur de France grâce à cette logique !

 

Mais ne devez-vous pas aussi rationaliser, comme le font vos concurrents ?

Dominique Lefebvre : il y a un mouvement continu de transformation avec de plus en plus de forces commerciales. Elles représentent aujourd'hui 80 % de nos 72.000 collaborateurs, alors qu'elles n'étaient que 60 à 65 % il y a 15 ans. Nous avons transformé l'an dernier près de 1.000 de nos 7.000 agences et investi massivement dans les canaux digitaux. Nous sommes des banques universelles qui servent tous leurs clients avec un niveau de compétitivité élevé, permis par un modèle fédéral de coopération, unique et très poussé.

R.A : le fait d'être partout, avec toute la puissance du Groupe, et de ne pas faire partout pareil crée de la performance. Que vous soyez dans le Morbihan, dans les Pyrénées ou en Saône-et-Loire, vous pouvez bénéficier de la puissance de feu des métiers de Crédit Agricole SA, d'AMUNDI dans la gestion d'actifs, de CACIB dans la banque d'investissement... C'est un modèle unique. Pour le coup, on est loin devant les néobanques !

 

Vous présenterez en juin un nouveau plan à moyen terme. Que pouvez-vous améliorer ?

R.A. : Nous avons encore beaucoup de potentiel en jouant davantage sur nos forces régionales et sur le collectif. Par exemple, 35 % de nos 21 millions de clients sont équipés d'assurance. Nous pouvons aller beaucoup plus loin ! Du coté des entreprises, nous avons des capacités bien supérieures sur certains métiers et nous pouvons explorer de nouveaux domaines en France et à l'international.

D.L. : Tous nos marchés actuels ne sont pas saturés, même si certains en ont l'impression. Il y a encore beaucoup à faire et à créer. De plus nos synergies internes sont un minerai que d'autres groupes centralisés ont déjà épuisé.

 

Faut-il aussi faire évoluer votre gouvernance ?

R.A. : le fait de vivre un modèle fédéral et d'animer une vie collective avec des entités autonomes, c'est ce que nous faisons depuis 70 ans à la Fédération. Ce système de gouvernance n'est pas discuté. Le fait d'avoir regroupé nos métiers chez Crédit Agricole SA et d'avoir construit une solidarité de fait avec ceux-ci, crée une relation simple. Et les Caisses Régionales jouent en même temps leur rôle d'actionnaire. Ce que nous avons simplifié, c'est de désigner un président unique, qui soit à la fois président du conseil d'administration de Crédit Agricole SA et de la Fédération. C'est le meilleur garant de l'unité du groupe...

 

Mais ne faut-il pas l'inscrire dans le marbre pour que cela fonctionne demain avec d'autres dirigeants ?

R.A. : C'est en travaillant ensemble que nous avons progressé. Nous devons maintenant ancrer une culture collective, c'est une volonté partagée par l'ensemble des dirigeants. Notre volonté est de pérenniser le bon fonctionnement actuel.

 

A travers une charte ?

R.A. : Par exemple. Il est possible d'écrire des règles du jeu internes telles qu'on les vit aujourd'hui. Ça permet de faire perdurer des choses au-delà des personnes. Mais ce n'est pas un projet organisationnel.

 

Pourquoi êtes-vous en Italie ?

R.A. : Nous développons en Italie le modèle que nous vivons en France. Notre intention stratégique, en tant que Caisses Régionales, c'est d'être en mesure d'accompagner nos clients à l'étranger et de permettre aux métiers de Crédit Agricole SA d'avoir une taille capable d'apporter de la performance. Dans cette logique, nous sommes tout à fait à l'aise pour développer une stratégie internationale.

 

Vous pourriez aller plus loin en Italie ?

R.A. : Nous l'avons fait en intégrant des banques régionales puis Pioneer dans la gestion d'actifs. Le marché Italien, est regardé comme le marché français.

 

Carige pourrait-il vous intéresser ?

R.A. : Nous ne commentons pas. La consolidation peut arriver sur beaucoup de domaines. Ce qui est important c'est d'expliciter notre stratégie. Nous nous inscrivons dans un temps long. Il peut y avoir des opportunités, mais qui doivent s'inscrire dans cette vision.

D.L. : les autorités se prononcent pour que l'Europe dispose d'établissements à la hauteur des banques américaines et en même temps imposent plus de capital au fur et à mesure que l'établissement grandit. C'est une des raisons qui font que beaucoup pensent que le processus de consolidation en Europe sera difficile.

 

Qu'est-ce que les Caisses Régionales attendent de CACIB ?

R.A. : nous avons dessiné CACIB tel que nous le voulions. C'est fondamental d'avoir une banque de grande clientèle qui soit présente à l'échelle internationale pour suivre nos clients. Dans chaque région, nous menons chaque année des opérations qui permettent à nos clients chefs d'entreprise de rencontrer les responsables de Desk de CACIB de 35 pays. Plus grand banquier en France, nous devons servir le besoin de croissance de toutes les entreprises.

 

« Avec les renégociations de crédits, nous avons redistribué plusieurs milliards de pouvoir d'achat »

D.L. : Chaque Caisse Régionale et entité du Groupe a décidé du montant de cette prime pour ses salariés. L'impact sera de 45 millions d'euros pour les 72.000 collaborateurs des Caisses Régionales.

D. L. : Nous estimons l'impact à environ 50 millions d'euros. Mais il y a une chose qui est un peu passée sous silence, c'est le coût de la vague de renégociation de crédits. Elle nous a quand même amenés à redistribuer plusieurs milliards de pouvoir d'achat dans l'économie française. Nous sommes loin d'être restés inertes !

R.A. : L'ensemble de nos Caisses Régionales a mis en place des dispositifs d'accompagnement et de surveillance de situations de trésorerie fragilisées. En coeur de villes, des commerçants ont perdu 20 à 40 % de chiffres d'affaires. La situation demande beaucoup d'attention.

D.L. : C'est trop tôt. Il faut d'abord détecter des retards de trésorerie et de paiement d'échéances.

 

lesechos.fr